vendredi 25 mai 2012

B comme Baguette


Alors que la Semaine du pain a eu lieu la semaine dernière et a mis à l'honneur le pain de tradition française, découvrons l'histoire de la baguette, véritable fleuron de la gastronomie

Selon l'essayiste Jean-Philippe de Tonnac, auteur du Dictionnaire universel du pain, la baguette se réinvente désormais grâce à quelques chefs et boulangers étoilés. Extraits d'un interview passionnant paru dans le quotidien Le Temps avec l'essayiste sur cet emblème identitaire: 

"Une (bonne) baguette, c'est quoi ? :  Le blancheur, la longueur, la légèreté et le croustillant, un grande douceur aussi ou une faible acidité, contrairement aux pâtes marquées par le levain.

Pourquoi le nom baguette ? Le boulanger de l'Ancien Régime vit à crédit. Pour chaque pain vendu, il trace une encoche sur une baguette de bois, le nom de cette première ardoise sera ensuite transposé au pain. 

Son histoire en quelques traits ? Elle s’apparie tout d’abord à la classe élevée. C’est le pain de Marie de Médicis, mère de Louis XIII, ce qui lui vaut d’être aussi baptisé «pain à la reine», au début du XVIIe siècle. On parle aussi de pain de Chailly (la farine vient de Chilly-Mazarin), puis de mollet, du fait de sa consistance. Au XIXe siècle, le jocko et le pain marchand de vin fait par les marchands des Halles sont ses ancêtres: des pains extrêmement longs, pouvant mesurer jusqu’à deux mètres. Mais c’est en 1920 qu’elle s’impose: farine raffinée, recours à la levure, méthode controversée mais déjà utilisée par les Gaulois. Une méthode directe permettant d’obtenir du pain, en quelques heures déjà, contrairement au levain qui nécessite deux à trois jours. On entre dans un monde nouveau. Une grosse part du budget des gens modestes, qui consomment 90 grammes de pain par jour en moyenne (contre 130 aujourd’hui), y est consacrée. Et la baguette va prendre tout le champ, tout l’espace. Après la guerre, après la subsistance, on verse dans l’industrialisation, on triche sur la qualité des farines, on nous sert un pain infâme…

Jusqu’à ce sursaut, ce retour du bon pain, dans les années 70 ? L’artisanat est exsangue, mais la profession a le mérite de se regrouper et de réagir: quoi, nous qui faisions le meilleur pain du monde – de l’avis unanime des voyageurs du XVIIIe siècle – ­ sommes désormais capables du pire, du plus infâme des pains… On relance la production de qualité, on réfléchit au mode de pétrissage, etc. Le décret de 1993 a contribué à préserver ce réseau et à faire émerger de formidables boulangers. Le plus vieil aliment du monde – dix mille ans d’histoire – est aussi celui auquel on avait cessé de réfléchir. On se répétait. Depuis vingt ans, on l’interroge, on le réinvente. La science de son côté apporte beaucoup de réponses. Longue fermentation, travail intelligent du meunier, condiments réfléchis, modes de cuisson: le pain s’inscrit dans toute cette réflexion sur l’alimentation. 

Comment la baguette est-elle devenue ce symbole identitaire ? Elle était à l’origine réservée aux classes aisées. Elle est aujourd’hui un objet identitaire et est associée au snacking (le jambon-beurre reste en France numéro un), mais aussi à l’élégance. Cette belle création a pris une place incroyable, 80% du marché de la boulangerie en France. Cela dit, depuis que les grands chefs se sont mis à en faire eux-mêmes et que quelques dizaines de boulangers étoilés ont lancé leur révolution, elle est redevenue le fleuron de 
la gastronomie française".



Je vous souhaite une magnifique journée gourmande de la vraie bonne baguette

Source: Le Temps, interview de Véronique Zbinden
Crédit photo : Martine Archambault/ le Figaro 


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